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Comment les nouvelles technologies transforment l’agriculture : drones, capteurs et big data au service des agriculteurs

20 février 2025

Les drones : une vision aérienne pour une gestion fine des cultures

Les drones, ces engins volants autrefois réservés à des usages militaires ou récréatifs, se sont imposés comme un outil indispensable dans les champs. Leur capacité à survoler les parcelles agricoles offre une perspective unique, permettant d’évaluer les cultures avec une précision impressionnante. Mais comment fonctionnent-ils réellement et quels sont leurs avantages pour les agriculteurs ?

Analyse des cultures grâce aux capteurs embarqués

Les drones agricoles sont généralement équipés de capteurs multispectraux ou thermiques. Ces dispositifs recueillent des données détaillées sur la santé des cultures : détection de maladies, évaluation du stress hydrique, mesure de la chlorophylle, etc. Une parcelle en souffrance ou infestée peut ainsi être identifiée immédiatement, avant que le problème ne s'aggrave.

Selon une étude de l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement), l’utilisation de drones permet de réduire de 20 % les pertes liées aux maladies ou au stress hydrique en agissant rapidement et localement. Ce gain de réactivité est crucial, notamment dans les régions touchées par la sécheresse ou les parasites.

Optimisation des traitements et des engrais

Grâce à la cartographie précise des parcelles réalisée par les drones, les agriculteurs peuvent appliquer des intrants de manière ciblée : uniquement aux zones qui en ont réellement besoin. Cela permet de diminuer la quantité de fertilisants ou de pesticides utilisés, tout en améliorant leur efficacité.

Un rapport de 2022 publié par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) souligne que cette approche de "traitement de précision" permet une réduction moyenne de 30 % des intrants chimiques, avec des bénéfices notables sur la santé des sols et la biodiversité locale.

Les capteurs connectés : collecter les données directement depuis le terrain

En complément des drones, les capteurs connectés se multiplient dans les exploitations agricoles. Placés directement dans les champs ou intégrés à des équipements agricoles, ils mesurent en temps réel une foule d’indicateurs essentiels, de la température du sol à l’humidité ambiante en passant par la croissance des plantes.

Les stations météo connectées

De plus en plus d’agriculteurs équipent leurs exploitations de stations météo connectées capables de fournir des données hyperlocales. Contrairement aux prévisions météorologiques générales, ces outils livrent des informations précises pour chaque parcelle, permettant d’ajuster au mieux les étapes clés comme l’irrigation ou les semis.

En Dordogne, où ma ferme expérimentale est située, j’ai installé une station météo connectée qui m’a permis d’ajuster mon système d’irrigation goutte-à-goutte. Les résultats ont été significatifs : une diminution de 25 % de ma consommation en eau tout en maintenant des cultures vigoureuses, même durant les périodes de sécheresse estivale.

Les capteurs dans les sols : une révolution silencieuse

Les capteurs enfouis dans les sols sont une autre technologie clé. Ils mesurent des paramètres comme le pH, la conductivité électrique (indicateur de la disponibilité des nutriments) ou encore la teneur en matière organique. Ces capteurs permettent aux agriculteurs d’intervenir de manière proactive pour protéger et enrichir leurs sols.

En combinant ces données avec des pratiques d’agriculture régénérative, il devient possible d’améliorer durablement la fertilité et la structure des sols. Une étude récente menée par AgriTech Insights a montré qu'un suivi régulier des sols grâce à des capteurs avait multiplié par 1,5 les rendements des cultures sur cinq ans.

Le big data agricole : l’intelligence artificielle au service de la décision

La quantité de données collectées par les drones, capteurs et autres outils connectés est impressionnante. Mais ces données n’auraient que peu d’intérêt si elles n’étaient pas analysées et interprétées. C’est ici que le big data entre en jeu, accompagné par des algorithmes puissants pour aider les agriculteurs à prendre des décisions éclairées.

Anticiper les rendements

Grâce à des modèles prédictifs basés sur des milliers de données (historique météorologique, état des sols, santé des cultures, etc.), les agriculteurs peuvent désormais anticiper avec précision leurs rendements. Ces prévisions facilitent la gestion des ressources, mais aussi la planification économique de l’exploitation.

Un agriculteur en Bourgogne, par exemple, a utilisé une plateforme de big data pour mieux gérer sa récolte de blé. Les prédictions de rendement lui ont permis d’optimiser la logistique de stockage et de négocier ses ventes à un moment où les prix étaient les plus avantageux.

Prévenir les risques climatiques

Les systèmes de big data fournissent également des alertes précoces pour les événements climatiques extrêmes : gelées tardives, sécheresses, précipitations intenses. Ces informations permettent aux agriculteurs de prendre des mesures préventives, comme protéger leurs cultures sensibles ou ajuster leur irrigation.

Les limites et défis des nouvelles technologies agricoles

Si ces innovations sont prometteuses, elles posent également des défis. Tout d’abord, leur coût d’acquisition reste élevé et peut freiner les petites exploitations. À cela s’ajoute la nécessité d’une formation technique pour les utiliser correctement. Enfin, la collecte massive de données soulève des questions éthiques et de sécurité : qui possède les données ? Comment garantir leur confidentialité ?

Ces questions doivent être prises en compte si l’on veut que ces technologies bénéficient à tous les agriculteurs, y compris les plus modestes, sans aggraver les inégalités.

Vers une agriculture toujours plus connectée

Les drones, capteurs et big data ne sont qu’un début. De nouvelles innovations, comme les robots agricoles autonomes ou les systèmes d’irrigation pilotés par intelligence artificielle, sont déjà en développement. Une agriculture numérique, capable de répondre aux défis climatiques et à la demande alimentaire croissante, semble inévitable.

En tant qu’agronome profondément ancrée dans la nature, je vois ces technologies non comme un substitut, mais comme un supplément précieux à notre compréhension des écosystèmes agricoles. Pourtant, il sera essentiel de maintenir un équilibre entre high-tech et low-tech, en ne perdant jamais de vue les fondamentaux de l’agriculture durable : des sols vivants, une biodiversité préservée et des pratiques respectueuses des cycles naturels.

Nous sommes à l’aube d’une véritable révolution verte. Bien utilisée, la technologie peut être un levier formidable pour une agriculture plus intelligente, plus économe et plus résiliente. Mais n’oublions pas : elle doit rester au service de l’agriculteur… et non l’inverse.

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