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Faire face aux sécheresses : des stratégies efficaces pour une meilleure gestion de l’eau en agriculture

16 février 2025

Comprendre les impacts des sécheresses sur l’agriculture

Avant de parler solutions, il est impératif de comprendre comment les sécheresses affectent concrètement les systèmes agricoles. Une sécheresse prolongée réduit drastiquement la disponibilité de l’eau pour les plantes. Cela engendre une baisse de la productivité des cultures, un affaiblissement de la santé des sols, et des tensions sur le fourrage pour l’élevage.

Selon la FAO, les récoltes céréalières mondiales peuvent chuter de 10 à 20 % lors d’événements de stress hydrique sévère. En France, la sécheresse de 2022 a contraint plusieurs milliers d’agriculteurs à réduire leurs semis d’automne, faute d’humidité suffisante dans les sols. Ces effets en cascade touchent non seulement la productivité économique, mais aussi la sécurité alimentaire régionale.

Stratégie 1 : améliorer la rétention d’eau dans les sols

Les sols sont la première "réserve" d’eau pour les cultures. Augmenter leur capacité de rétention est une des clés pour résister à des épisodes secs prolongés.

Augmenter la matière organique des sols

Un sol riche en matière organique peut retenir jusqu’à 20 fois son poids en eau. Les pratiques comme l’ajout de compost, l’enfouissement de fumier ou encore le semis de cultures de couverture améliorent la structure du sol. Ces apports favorisent également une meilleure infiltration de l’eau lors des pluies.

Limiter le tassement des sols

Les sols compactés deviennent imperméables, empêchant l’eau de pénétrer en profondeur. Limiter le passage des engins agricoles lourds, ou encore utiliser des techniques de semis direct, permet de préserver la porosité du sol.

Stratégie 2 : diversifier les cultures et intégrer des arbres

La diversification des cultures et l’intégration des arbres dans les parcelles grâce à l’agroforesterie sont des solutions qui améliorent la gestion de l’eau de manière naturelle.

Choisir des cultures adaptées

Diversifier les espèces cultivées permet de réduire les risques. Par exemple, intégrer des variétés résistantes à la sécheresse comme le sorgho ou des légumineuses peu gourmandes en eau peut être une alternative efficace, notamment dans les régions où les étés deviennent de plus en plus longs et chauds.

Les arbres comme alliés de l’eau

Les systèmes agroforestiers jouent un rôle précieux dans la gestion hydrique. Les arbres agissent comme des abris pour les cultures en réduisant l’évaporation grâce à leur ombrage. De plus, leurs racines profondes ramènent l’humidité depuis des nappes phréatiques profondes jusqu’en surface, créant un microclimat bénéfique. Une étude publiée dans *Science* (2021) a montré que l’agroforesterie peut réduire de plus de 30 % les pertes d’eau par évaporation dans certaines zones sensibles.

Stratégie 3 : optimiser les systèmes d’irrigation

L’irrigation représente plus de 70 % de l’utilisation d’eau douce à l’échelle mondiale. Des méthodes plus économes et précises permettent toutefois d’utiliser cette ressource de manière responsable.

L’irrigation goutte à goutte

C’est l’une des techniques les plus économes en eau. En apportant l’eau directement aux racines, on limite les pertes par évaporation. Bien que l’installation initiale puisse être coûteuse, de nombreux agriculteurs rentabilisent leur équipement rapidement grâce aux économies réalisées.

La gestion de l’irrigation par capteurs

Les nouvelles technologies, comme les capteurs d’humidité reliés à des outils numériques, permettent de détecter les besoins hydriques des plantes en temps réel. Ces données réduisent les arrosages inutiles. En parallèle, des applications mobiles permettent de piloter à distance la quantité d’eau distribuée.

Stratégie 4 : recueillir et stocker l’eau

En période de sécheresse, chaque goutte d’eau devient précieuse. Anticiper les besoins en stockant l’eau lors des saisons plus pluvieuses peut offrir une solution durable.

Création de mares et de retenues collinaires

Ces infrastructures permettent de collecter naturellement les eaux de ruissellement. Bien dimensionnées et respectueuses de la biodiversité locale, elles peuvent fournir une réserve précieuse aux agriculteurs.

Récupération des eaux de pluie

Installer des systèmes de récupération sur les toitures agricoles (granges, serres) est facile à mettre en place et très rentable. Un toit de 100 m² peut collecter jusqu’à 80 000 litres d’eau par an dans des régions à pluviométrie moyenne.

Stratégie 5 : imiter la nature avec des systèmes résilients

Parmi les systèmes inspirants, la permaculture et l’agroécologie offrent des pistes intéressantes.

En permaculture, l’agencement des cultures est pensé pour minimiser les pertes d’eau. Les buttes, par exemple, permettent un drainage naturel et facilitent la rétention hydrique. Associer plantes couvre-sol, paillages naturels et bandes végétales en bordure des parcelles induit également un gain hydrique.

Les agricultures inspirées de la nature misent également sur l’interaction entre les différentes espèces. Des plantes fixatrices d’azote, des systèmes racinaires complémentaires et des haies pour protéger du vent participent à la résilience hydrique globale des systèmes.

Un exemple concret : la résilience de ma ferme expérimentale en Dordogne

Sur ma ferme expérimentale, nous avons combiné plusieurs de ces techniques pour créer un système multi-couches résilient à la sécheresse. Par exemple, en 2022, j’ai introduit une association de blé sous couvert d’un verger de châtaigniers en bordure de parcelles. Grâce à un paillage nourri et à un goutte-à-goutte solaire, l’évaporation des sols a chuté de près de 40 % par rapport à une parcelle nue avoisinante. Résultat : une récolte satisfaisante malgré un été parmi les plus secs depuis des décennies.

Vers une agriculture mieux adaptée aux défis hydriques

Face à des sécheresses de plus en plus fréquentes, la gestion de l’eau dans nos exploitations agricoles ne peut plus se résumer à de simples ajustements. Il s’agit de repenser nos méthodes de production de manière globale, en nous inspirant des écosystèmes naturels, des savoirs ancestraux et des technologies modernes. Si chacun de ces outils peut paraître isolément modeste, combinés, ils offrent une panoplie puissante pour transformer nos pratiques.

En adoptant ces stratégies, les agriculteurs peuvent non seulement protéger leurs rendements, mais aussi participer activement à un modèle agricole durable, qui réconcilie besoins alimentaires et préservation des ressources naturelles. Et vous, quelles actions mettez-vous en place sur vos terres pour économiser cette ressource vitale ?

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